Les responsabilités des gouvernements et de la Ville
Le RAPSIM est depuis 1974 partenaire des travaux menés par les gouvernements et la Ville pour se doter d’une politique, d’un plan d’actions et de stratégies en itinérance. Le RAPSIM était impliqué lors du Comité des sans-abri de la Ville de Montréal dans le cadre l’AILSA en 1987, jusqu’aux travaux en cours par différents paliers de gouvernements.
Cette implication dans ces travaux a permis de faire reconnaitre l’importance du sujet de l’itinérance, de sa diversité et de montrer l’ampleur du travail à accomplir pour la contrer. De pair avec cette action, le RAPSIM a continué de se mobiliser avec ses membres pour que des investissements suffisants soient consacrés aux actions pour contrer l’itinérance.
Des responsabilités importantes
La Ville a aussi un rôle important à jouer en ce qui concerne la lutte contre l’itinérance, un rôle qui est même croissant avec les pouvoirs et parfois les moyens qui lui sont transférés;
Depuis l’administration de Jean Doré en 1986 et la mobilisation du milieu depuis cette date, mobilisation dont le RAPSIM a fortement pris part, les différentes administrations ont reconnu leur responsabilité en matière de lutte contre l’itinérance. Des actions sont identifiées dans les plans de ces administrations au niveau de la sauvegarde des maisons de chambres, du développement de logements sociaux et des actions de la police.
Un rôle principal dans la lutte contre l’itinérance
C’est le gouvernement du Québec qui a la principale responsabilité dans la lutte contre l’itinérance, puisque toutes les actions en découlant sont sous sa responsabilité. Cela a été reconnu par la « Commission parlementaire sur l’itinérance tenue en 2008-2009 » et dans le « Plan d’action interministériel 2009-2015 » qui l’a suivie.
C’est avec l’adoption en 2014 de la « Politique nationale de lutte à l’itinérance —Pour éviter la rue et en sortir », que cette responsabilité a été pleinement reconnue. Cette politique avait été demandée activement par le RAPSIM, le RSIQ, la Ville de Montréal et de nombreux acteurs, nombreuses actrices dont la CDPDJQ et le Barreau du Québec.
La politique adoptée par le gouvernement du Québec, avec sa vision de l’itinérance qui reconnait que celle-ci est un déni de droits et avec son approche globale des actions à entreprendre pour prévenir et réduire le phénomène, interpelle l’action de 13 ministères.
Un 2e Plan d’action interministériel, 2015-2020, a été adopté dans la foulée de l’adoption de la Politique, identifiant un bon nombre de mesures pertinentes à déployer. Plusieurs progrès ont été marqués dans l’accès aux services de santé et aux services sociaux ainsi que dans le développement de logements sociaux avec soutien communautaire et des mesures d’insertion.
La volonté politique d’assurer que les actions prescrites soient pleinement appliquées a manqué. Cette inaction est survenue dans un contexte marqué par des mesures d’austérité sélective affectant particulièrement les programmes sociaux. Dans ce contexte, les actions menées n’ont pas été suffisantes pour contrer l’accroissement de l’itinérance qui est vécue à Montréal et dans bien des régions du Québec. Cet échec n’est pas dû aux faiblesses de la Politique et du Plan d’action qui identifient bien les actions à mener pour prévenir l’itinérance, telles que la sortie des centres jeunesse et la perte de logement, mais plutôt au manque de moyens pour entreprendre ces actions.
Des travaux majeurs sont en cours en 2020 pour mener à l’adoption d’un nouveau Plan d’action interministériel. Celui-ci devra revoir et actualiser les actions prévues dans l’ancien plan. Ce plan devra surtout être piloté avec un leadership solide et soutenu par le gouvernement. Tous les ministères interpellés par la Politique en itinérance devront assumer leurs responsabilités afin de permettre la réalisation de l’objectif : « Éviter la rue et en sortir ». La réalisation du nouveau plan demandera des investissements majeurs et récurrents.
Une responsabilité majeure en itinérance
Avec ses choix budgétaires et politiques, le gouvernement fédéral joue un rôle majeur dans ce qui peut contribuer à faire croitre l’itinérance ou la réduire. Par exemple, l’abandon du soutien au développement du logement social depuis 1994 a privé le Québec de 75 000 nouvelles unités. L’abolition du Régime d’assurance publique du Canada a pavé la voie aux provinces pour établir des prestations d’aide sociale ne couvrant plus les besoins essentiels, comme le Régime le prescrivait;
Depuis 1999, avec un programme qui se nomme à ce jour « Vers un chez-soi », le gouvernement fédéral soutient les actions des organismes communautaires œuvrant en lutte contre l’itinérance. Ce programme n’a pas remplacé les investissements structurels déterminants que le fédéral doit assumer, aussi, « Vers un chez-soi » n’a pu remplir son objectif de réduire l’itinérance;
Les investissements fédéraux dans la lutte contre l’itinérance ont cependant été utiles pour soutenir les interventions d’accueil, d’accompagnement, de soutien menées dans les ressources, ainsi que le travail accompli dans la rue. Les programmes fédéraux en itinérance ont aussi soutenu la réalisation de plus de 1500 logements sociaux pour personnes itinérantes depuis 20 ans à Montréal. Ils ont aussi contribué à améliorer les installations des organismes, tels que CACTUS et l’Itinéraire, leur permettant de s’installer au centre-ville;
Le RAPSIM et le RSIQ ont sans cesse travaillé pour demander la reconduction de ce programme fédéral, dont les investissements engagés pour de courtes périodes de 1 à 3 ans. En 2013, le gouvernement fédéral (avec le parti Conservateur au pouvoir ) annonçait un virage vers le Housing first, une approche ciblant les personnes en situation d’itinérance chronique et privilégiant une aide en logement privé;
Le RAPSIM et ses membres ont fortement combattu ce virage qui a entrainé des coupures dans différentes interventions menées auprès de différentes populations et permettant de réduire et prévenir l’itinérance. En 2016, le gouvernement a annoncé des fonds accrus pour la lutte, qui ont permis de rétablir une approche globale dans les actions entreprises;
Avec ses trois stratégies adoptées en 2017 et 2018 en logement, lutte à la pauvreté et en itinérance, le gouvernement libéral au pouvoir au fédéral sous le mandat de Justin Trudeau a reconnu et nommé l’importance de ses responsabilités en lien avec l’itinérance;
Les budgets qui ont été investis sont à ce jour insuffisants. Ainsi, en logement social, aucun financement dédié n’est annoncé et aucune garantie n’a été faite dans le sens du maintien des unités qui avaient été développées grâce au financement fédéral jusqu’en 1994;
Pour ce qui est des objectifs, toutes les stratégies fédérales visent à réduire l’itinérance chronique de 50 %. Or, cet objectif ne pourra être atteint que si les actions nécessaires sont menées pour prévenir l’itinérance, notamment celles qui concernent la pauvreté et le logement et qui sont de compétences fédérales.